Les Belges, leur histoire ...

et celle de leur patrie, la Belgique

La campagne des 18 jours

Campagne des 18 jours
La campagne des 18 jours

Source : Ancien manuel scolaire

L’hiver de 1939 à 1940 s’était écoulé dans un calme relatif. Graduellement, le Reich avait massé plus de 70 divisions aux frontières de la Hollande et de la Belgique.

Devant cette menace, le gouvernement avait retiré de plus en plus de force de sa frontière méridionale pour les grouper à l’Est. Après une alerte, en novembre, il avait laissé entendre qu’il ne laisserait pas envahir les Pays-Bas sans prendre position. En revanche, il poussait le souci de la neutralité au point de se refuser à toute action d’assistance préventive de la France ou de l’Angleterre.

Le 9 avril 1940, l’invasion simultanée du Danemark et de la Norvège par les Allemands ouvrait brusquement la phase critique des opérations en Europe occidentale.

  • A l’aube du 10 mai 1940, l’aviation allemande bombardait, sans ultimatum ni déclaration de guerre, les aérodromes et les nœuds de communication belges. Par ce coup traitreux, l’armée perdait au sol 56 appareils sur 180.
  • A 8 heures, l’ambassadeur d’Allemagne remettait une note au ministre des Affaires Etrangères, P.H. Spaak, donnant pour prétexte à l’invasion le désir de « prévenir une invasion étrangère ». Spaak coupa la parole au diplomate et protesta avec énergie.
  • Le roi Léopold III, qui avait pris le commandement de l’armée, lança à la nation une proclamation dans laquelle figurait cette phrase :

 « Entre le sacrifice et le déshonneur, le Belge de 1940 n’hésite pas plus que celui de 1914 ! ».


Attaque du 10 mai 1940 Paul-Henri Spaak Allocution du roi Léopold III
L’attaque du 10 mai 1940 Paul-Henri Spaak L’allocution du roi Léopold III


Mais l’invasion simultanée des Pays-Bas et de la Belgique par des forces écrasantes obligea l’armée à un repli immédiat sur la ligne K.W. La gravité de la situation fut encore aggravée par les 2 faits suivants :

  • Le fort d’Eben-Emael, principal pilier protecteur de Liège, fut mis hors de service en quelques heures par des parachutistes et des soldats du génie descendus en planeurs
  • Le front du canal Albert s’effondra. Les soldats belges eurent beaucoup de peine à tenir devant l’aviation allemande, maîtresse du ciel, et qui usait de la terrifiante tactique des bombardements en piqué. Quelques unités flamandes, secrètement noyautées par des séparatistes, ne tardèrent pas à se démoraliser.

Dès le 12 mai, de nouvelles difficultés surgirent.

  • Ayant encore à l’esprit les atrocités d’août 1914, la population civile se laissa gagner par la panique. Quelque 2.000.000 de Belges se précipitèrent sur les routes vers le littoral ou la France, en auto, en charrette, à vélo, à pied, et paralysèrent les mouvements des troupes.
  • L’aviation allemande n’hésita pas à porter l’affolement à son comble en mitraillant à bout portant ces colonnes de réfugiés.
  • De plus, les non-mobilisés de 18 à 35 ans avaient reçu l’ordre de se replier vers la France. Ils avaient courageusement suivi cette consigne mais, de ce fait, augmentaient encore l’encombrement des routes.

Fort d'Eben-Emael Bombardement de réfugiés en 1940
Le fort d’Eben-Emael  
Wikipedia
Bombardement de réfugiés  
Chronologie de la Belgique de 1830 à nos jours


La seule consolation, en ces jours de détresse, résidait dans l’arrivée rapide de nombreux secours alliés :

  • Anglais sur la Dyle
  • Français aux bouches de l’Escaut, vers la Hesbaye et la Meuse, et dans le Luxembourg

La résistance sur la ligne Anvers-Namur fut rendue impossible par plusieurs nouveaux drames.

  • Le 15 mai, l’armée hollandaise était contrainte à la capitulation. Submergée par la « cinquième colonne » et terrifiée par un bombardement inhumain de Rotterdam, la Hollande se soumettait inconditionnellement au vainqueur.
  • Dès le 13 mai, les Allemands avaient franchi la Meuse à Dinant et à Sedan.
  • Le 14 et le 15, les Panzer Divisionen taillaient en pièces l’armée française au-delà de la brèche de Sedan puis fonçaient vers l’Ouest et, en moins d’une semaine, atteignaient Amiens et Abbeville.

La tâche essentielle de l’armée belge résidait désormais uniquement dans la défense du sol natal. Tandis que les forts de Namur et de Liège poursuivaient une vaillante résistance (celui de Pepinster tint jusqu’au 29 mai), l’armée se replia derrière l’Escaut. Bruxelles dut être abandonnée dans la nuit du 17 au 18 mai.

Dunkerque après l'embarquement
Dunkerque après l’embarquement

Source : La Deuxième Guerre mondiale racontée  
aux enfants, p. 33

L’action au front occidental tournait au désastre. Du côté français, le général Weygand voulut tenter de cisailler la pointe allemande en Picardie. Il lança une double offensive :

  • De la Somme vers le Nord-Est
  • Et, en sens inverse, de la région d’Arras-Douai vers le Sud-Ouest

Par là, une brèche s’ouvrait nécessairement entre les forces françaises et belges et ces dernières se trouvaient menacées d’encerclement. Elles se replièrent encore, cette fois jusque dans le quadrilatère « Lys - Bas Escaut - Mer du Nord », devenu le réduit national. Comme il y avait lieu de le craindre, l’offensive du général Weygand échoua :

  • Il n’y avait pas de commandement unique, pas de coordination dans les opérations.
  • Dès le 25, de nombreux généraux français envisageaient la nécessité d’une capitulation
  • De son côté, l’Angleterre voulut sauver ce qu’il y avait moyen de sauver encore. Au prix de presque tout son matériel motorisé et d’une perte de 30.000 hommes, elle réussit à faire repasser le Pas-de-Calais par 337.000 hommes. Le « miracle de Dunkerque » (27 mai – 3 juin 1940) allait permettre aux Anglais de gagner la guerre et de sauver l’Europe, 3 ans plus tard.

Mais, momentanément, leur départ laissait l’armée belge épuisée, livrée à ses seuls moyens. L’artillerie, les chasseurs ardennais et de nombreuses unités d’élite continuèrent à combattre sur la Dendre, l’Escaut, la Lys, et infligèrent aux Allemands des pertes supérieures à toutes celles qu’ils avaient subies jusqu’à ce jour.

Le 27 mai la capitulation était néanmoins devenue inévitable. Les Allemands exigèrent qu’elle soit inconditionnelle. Elle eut lieu le 28, à 4 heures du matin. L’armée belge, à bout de forces, avait perdu en tués :

  • 308 officiers
  • 5.790 sous-officiers et soldats.

Après la capitulation, près de 171.000 prisonniers de guerre furent déportés vers l’Allemagne, dont :

  • 106.000 Flamands
  • 65.000 francophones

Dès le 25 mai, le ministre Pierlot décida de se retirer en Angleterre et demanda au Roi de l’accompagner dans sa retraite. Léopold III préféra partager le sort de son armée et fut interné au château de Laeken.

Léopold III signe la capitulation de la Belgique Winston Churchill
Léopold III signe la capitulation Winston Churchill 
Source : Encyclopédie Alpha, p. 1393


La soudaineté de la catastrophe belge fit, dans les premiers moments de désarroi, naître des interprétations malveillantes et injurieuses. Le Premier Ministre français Reynaud osa accuser la Belgique de trahison ! Mais bientôt des déclarations autorisées, émanant notamment de Winston Churchill, Premier Ministre d’Angleterre depuis le 10 mai, rétablirent les faits dans leur exactitude et admirent l’inéluctabilité du désastre.

En Belgique même, le sentiment de stupeur et d’écrasement, né à l’annonce de la capitulation, fut tant soit peu contrebattu par une déclaration du ministre Pierlot qui, le 28 mai :

  • Affirmait la volonté nationale de poursuivre la lutte, coûte que coûte, aux côtés des Alliés.
  • Signifiait que, le roi étant prisonnier, il n’était plus en situation de gouverner.

Le rapide déroulement de la campagne des 18 jours eut tout au moins un résultat positif : l’invasion ne fit qu’écorcher le sol belge. Il y eut néanmoins quelques bombardements dramatiques au cours de cette courte période.

Belgique dans la deuxième guerre mondiale