Les Belges, leur histoire ...

et celle de leur patrie, la Belgique

Le conflit

La Belgique pendant la Première Guerre mondiale
La Belgique pendant la Première Guerre mondiale

Source : Ancien manuel scolaire

Jusque dans la nuit du 3 au 4 août, les divisions d’armée avaient surveillé les frontières :

  • Une division s’appuyait sur la place de Liège,
  • L’autre sur Namur.

Le Roi prit personnellement le haut commandement des opérations militaires. Il avait en tout 117.000 hommes sous ses ordres. Il leur adressa une proclamation énergique dans laquelle il rappelait :

  • Aux Flamands, la bataille des Eperons d’or
  • Aux Wallons, l’héroïsme des Franchimontois.

Malgré l’élan de patriotisme, force était de constater qu’en 1914, l’armée était en pleine voie de réorganisation :

  • Les unités étaient enchevêtrées
  • Les compagnies ne comprenaient que 2 pelotons au lieu de 3
  • Il y avait un déficit de plusieurs centaines d’officiers
  • Les soldats manquaient de mitrailleuses et d’outils
  • Rien de sérieux n’avait jamais été fait pour adapter la garde civique (née en 1830) au rôle d’armée territoriale.
  • Les troupes avaient encore des uniformes incompatibles avec les exigences de la guerre moderne

Les circonstances dictaient à l’armée belge un devoir précis : en attendant le secours de la France et de l’Angleterre, elle devait servir d’avant-garde générale et résister le plus longtemps possible, tout en évitant une bataille décisive.

  • Du 4 au 16 août : la défense de Liège permit de freiner l’avance allemande
  • Le 12 août : victoire de Haelen
  • Le 18 août : retraite sur Anvers
  • Le 20 août : occupation de Bruxelles
  • Du 21 au 25 août : défense de Namur

A partir du 20 août de nouveaux devoirs s’imposèrent à l’armée belge. Campée le long de l’Escaut, du Rupel et de la Nèthe, elle devait :

  • Garder libre son éventuelle ligne de retraite vers Ostende
  • Retenir l’ennemi et harceler ses voies de communication.

Garde civique Evacuation d'Anvers
La garde civique 
Source : Bruxelles, où est le temps, p. 251
Evacuation d’Anvers 
Chronologie de la Belgique de 1830 à nos jours, p. 146


Incapables d’atteindre Paris, les Allemands se mirent en devoir de prendre au moins Anvers. La place forte leur fournirait beaucoup de vivres, de munitions et de matériel de toute espèce. Successivement, tous les forts furent transformés en monceaux de décombres. Il était évident que, malgré le renfort de 8.000 fantassins de marine anglais, la chute d’Anvers ne serait qu’une question de jours.

Le haut commandement décida alors d’évacuer en grand secret :

  • 6 ponts de bateaux furent jetés sur l’Escaut
  • Jusqu’au 7 octobre 1914, quelque 10.000 hommes partirent chaque nuit vers le littoral emmenant leurs canons, leurs autos et leur matériel
  • Dans l’entre-temps, les troupes de couverture défendaient la ligne de la Nèthe et celle de l’Escaut
  • Lorsque les Allemands pénétrèrent dans Anvers, la cité était déserte, les navires allemands capturés dans le port avaient été mis hors d’usage et les tanks à pétrole de Hoboken étaient en feu.

Le général allemand von Beseler se montra furieux d’avoir laissé échapper l’armée belge à son étreinte ; il ne se consolait pas d’avoir sacrifié des milliers d’hommes à la conquête d’une position évacuée.

La bataille de l’Yser

Bataille de l'Yser
Bataille de l’Yser

Source : Histoire de la Belgique 
et de son expansion coloniale, p. 684

Jusque-là l’armée belge avait rempli un rôle des plus glorieux mais aussi des plus ingrats. Obligée de reculer sans cesse, livrée presque uniquement à ses propres forces, elle semblait sur le point de se décourager. C’est alors que le roi Albert 1er prit la résolution de tenter un suprême effort sur le sol belge. Le 13 octobre, il établit son armée sur l’Yser, un petit fleuve côtier. La position était heureusement choisie :

  • L’aile gauche, retranchée à Nieuport pouvait compter sur le secours de la grosse artillerie de marine anglaise
  • A partir du vieux fort de La Knocke, la ligne quittait l’Yser et suivait l’Yperlée canalisée jusqu’à Boesinghe, où elle rejoignait l’armée française chargée de la défense du secteur d’Ypres-Armentières.
  • Au centre de la défense se trouvait la petite ville de Dixmude que gardaient conjointement les Belges et 6.000 fusiliers marins français.

Désormais, l’armée belge faisait partie de l’immense ligne de défenses retranchées que, de la mer aux Vosges, les nations occidentales opposaient aux Allemands. Elle y occupait une zone de 18 à 36 km selon les nécessités du moment. Leur poste couvrait Calais et Dunkerque, objectifs âprement convoités par les troupes allemandes.

La région de l’Yser était toute en prairies, coupée de canaux rectilignes et de hautes digues. Le pire inconvénient pour les soldats belges résidait dans la nature spongieuse du sol. Ils ne pouvaient creuser de tranchées à plus d’un mètre de profondeur sans s’enfoncer dans une eau vaseuse. Ils furent donc contraints de surélever leurs parapets au moyen de sacs de sable.

Le haut commandement français avait demandé aux Belges de résister 48 heures ; ils tinrent pendant 15 jours.

Attendant le succès grâce à leur nombre et à la violence de leurs chocs, les Allemands chargeaient après de terribles préparations d’artillerie. Après plusieurs jours de combats, la situation devint critique au centre de la ligne, les Allemands avaient réussi à passer l’Yser et à atteindre le remblai du chemin de fer de Dixmude à Nieuport.

Les Belges étaient à bout, décimés, sans réserves. Les batteries n’avaient plus qu’une centaine de coups à tirer par pièce et la moitié des canons étaient hors d’usage. Les Allemands étaient, eux aussi, épuisés.

C’est alors que, le 28 octobre, le roi fit ouvrir les écluses de Nieuport. Cette opération provoqua l’infiltration des eaux et peu à peu la vallée de l’Yser se transforma en un marécage de boue, puis en un lac immense de 25.000 km2. Les Allemands furent terrifiés par la montée sournoise des eaux. Abandonnant canons et matériel, ils se retirèrent sur la rive droite de l’Yser. Le 31 octobre, la sanglante bataille de l’Yser était terminée :

  • 7 divisions allemandes (soit plus de 100.000 hommes) y avaient été, les unes décimées, les autres détruites
  • Les Belges avaient perdu 16.000 hommes (tués et blessés), c’est-à-dire plus du quart de leurs effectifs.
Inondations de l'Yser
Inondations de l’Yser

Source : La Patrie belge, 1830-1930, p. 128

Pendant 3 mois, l’armée belge a donc opposé à l’agresseur beaucoup plus qu’une résistance symbolique. Cette attitude créa la surprise, notamment en France où les Belges devinrent très populaires.

La bataille d’Ypres

Boyaux de l'Yser
Boyaux de cheminement à Dixmude

Source : La Belgique centenaire, p. 296

De la fin d’octobre à la première moitié de novembre, les Allemands, ne comptant plus leurs morts, firent un nouvel essai de percée vers Calais, dans le secteur d’Ypres. Cette fois ce furent les troupes britanniques qui opposèrent une invincible résistance à l’ennemi. Les Anglais y perdirent les 2/3 de leurs effectifs mais les Allemands n’atteignirent jamais Ypres.

Cette bataille mit fin à la guerre de mouvements sur le front de l’Ouest. Pendant 3 ans et demi, les adversaires allaient maintenant se terrer et combattre dans des tranchées reliées entre elles par des boyaux de cheminement et protégées par un épais réseau de fil de fer barbelé.

Une petite parcelle du territoire belge comprenant une cinquantaine de localités entre l’Yser et la frontière française, échappait à l’occupation allemande. C’est là que l’armée belge allait continuer à « monter la garde de l’Yser » :

  • En arrêtant l’attaque allemande
  • En renouvelant sans cesse les centaines de milliers de petits sacs de terre (vaderlandertjes) qui renforçaient les parois mouvantes de ses tranchées.

Peu à peu, la situation s’améliorait :

  • L’armée parvint à se rééquiper
  • Les soldats adoptèrent le casque à la place du béret
  • Les uniformes devinrent plus fonctionnels et furent confectionnés en tissus de nuance brun kaki
  • Établi à Saint-Adresse, près du Havre (lieu où il avait reçu asile après l’évacuation d’Anvers), le gouvernement veillait à pourvoir les troupes en grosse artillerie, en mitrailleuses et en matériel.
  • Le Roi demeurait au milieu de ses soldats, tandis que la Reine accomplissait des œuvres de charité dans les hôpitaux à l’arrière du front.

Les opérations de novembre 1914 à septembre 1918, furent spécialement actives :

  • En avril 1915, les Allemands réussirent, grâce à l’emploi de gaz asphyxiants, à passer le canal de Steenstraete au Nord d’Ypres. Fantassins et artilleurs belges aidèrent les Français et les Anglais à reprendre le terrain perdu. Ce fut une rude bataille de 8 jours
  • Pendant l’été 1917, les Belges appuyèrent l’aile gauche des troupes franco-britanniques qui essayaient de percer en Flandre
  • Le 9 avril 1918, les Allemands, arrêtés devant Amiens, déclenchèrent une terrible offensive sur la Haute Lys. Ils menaçaient les lignes de communication de l’armée belge. Les troupes, sous le commandement du général Jacques et du général Michel arrêtèrent 4 divisions allemandes dans la région de Langemark. Ce fut la glorieuse bataille de Merckem-Kippe.

Artillerie 14-18 Reine Elisabeth visite un hôpital Gaz asphyxiants Général Jacques
Nouveau matériel de guerre 
Histoire de la Belgique en mots
et en images, p. 166

La reine visite un hôpital 
Chronologie de la Belgique de 1830
à nos jours, p. 146

Gaz asphyxiants 
La Nouvelle Encyclopédie, p. 1513

Le général Jacques 
Wikipedia

La libération du territoire

Batailles décisives de la guerre en 1918
Batailles pour la libération du territoire

Source : Histoire de la Belgique et de son expansion coloniale, p. 698

A la fin de septembre 1918, l’armée belge allait jouer un rôle actif dans le grand mouvement offensif du général Foch. Le Roi en informa ses troupes le 27 par une courte et énergique proclamation.

La victoire de la Crête des Flandres (28 septembre – 4 octobre 1918)

Le Roi avait sous ses ordres, outre l’armée belge, une partie des armées française et anglaise. Son but était de chasser les Allemands du littoral par une percée foudroyante, opérée « en secret, avec audace et surprise » vers Thourout et Bruges.

Convoi de ravitallement
Convoi de ravitaillement

Source : La Patrie belge, 1830-1930, p. 121

L’effort à fournir par les Belges était terrible :

  • Ils devaient traverser un terrain découvert, criblé de milliers de trous d’obus jointifs dus aux pilonnages de 1917-1918.
  • Chaque cratère était transformé en mare.
  • Devant le centre du front d’attaque se dressait la forêt d’Houthulst avec ses abris bétonnés, ses rideaux de fils de fer barbelés et ses nids à mitrailleuses.
  • Les Allemands étaient protégés par 6 rangées de tranchées.

L’assaut eut lieu à l’aube sous une pluie torrentielle. Les troupes avancèrent de plus de 6 km sur un front de 18 km. Le lendemain, l’armée belge conquérait, malgré la présence de renforts allemands, toute la crête des Flandres, ce qui amena l’évacuation de Dixmude et la retraite des Allemands jusqu’aux abords de Roulers.

Malheureusement, le temps était épouvantable ; les canons et le charroi ne parvenaient plus à avancer. La bataille de la Crête des Flandre dut donc être interrompue le 4 octobre pour établir les communications avec l’arrière. Les troupes étaient d’ailleurs épuisées et avaient subi de lourdes pertes. Néanmoins, la victoire était superbe. En certains points, l’avance réalisée avait été de 18 km.

La victoire de Thourout-Thielt (14-18 octobre)

Dix jours plus tard, des chaussées construites par le génie, avec des madriers et des moellons, permettaient à la grosse artillerie d’appuyer un nouvel effort décisif. Le succès fut immédiat sur tout le front ; l’ennemi fuyait, poursuivi par la cavalerie. Cette fois, le front était percé !

Le 15 octobre, la garde de l’Yser était terminée. Le 16, ce fut la débâcle : les divisions allemandes battaient en retraite de la frontière hollandaise à la Lys, abandonnant toute leur artillerie et leur matériel. La Flandre Occidentale était libérée !

Bataille de Thourout-Tielt Après la bataille de Boesinghe Albert 1er, roi-soldat

Bataille de Thourout-Tielt 
Chronologie de la Belgique de 1830
à nos jours, p. 156

Après la bataille … 
La Patrie belge, 1830-1930, p. 135

Le roi-soldat 
Encyclopédie Alpha, p. 118


La participation de l’armée belge à la campagne de libération fut très meurtrière :

  • 3.500 soldats furent tués, dont 253 officiers
  • 31.000 furent blessés

 
Le lundi 11 novembre, à 11 heures, l’armistice entra en vigueur.

Séparateur 


Pendant toute la durée de la guerre, Albert 1ers’est efforcé de concilier ses deux fonctions de chef d’Etat et de commandant en chef de l’armée :

  • Il veillait sans cesse à ménager ses troupes en évitant de les faire intervenir dans des offensives qui n’avaient aucune chance de succès
  • Il tenait à sauvegarder l’indépendance de son armée en refusant de la placer sous un commandement interallié. Il se souciait de n’accepter une action concertée avec les Anglais et les Français que dans la mesure où elle entrait dans les possibilités des forces belges.
  • Albert 1er était convaincu que la guerre ne pourrait être gagnée par aucun des deux camps en présence. Dans cette optique, il était favorable à une paix négociée entre les belligérants tout en étant opposé à une paix séparée entre l’Allemagne et la Belgique. Cette tentative de conciliation échoua.
Belgique dans la première guerre mondiale